Manquement à l’obligation de sécurité et prise en compte nécessaire des préconisations du médecin du travail (Cass. Soc., 2 mars 2016, n°14-19639)

Selon l’article L. 4624-1 du Code du travail, l’employeur est tenu de prendre en considération les propositions du médecin du travail et en cas de refus, de faire connaitre les motifs qui s’opposent à ce qu’il y soit donné suite.

Les propositions du médecin du travail peuvent ainsi porter sur des mesures individuelles telles que des mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives par exemple à l’âge ou encore à l’état de santé physique ou mentale des salariés.

En l’espèce, au sujet d’un salarié jugé apte, le médecin du travail avait justement préconisé une « mutation sur un poste plus proche du domicile ». Le médecin du travail ajoutait que cette mutation était « à envisager dès que possible ». Il s’agissait au cas particulier d’une mesure destinée à un salarié ayant été victime d’un accident vasculaire cérébral en 2006. Cette préconisation du médecin du travail avait été réitérée chaque année, entre 2006 et 2009.

Face à l’attitude de l’employeur qui n’avait réalisé aucune démarche conforme à la préconisation du médecin du travail, le salarié avait saisi la juridiction prud’homale d’une demande de dommages et intérêts.

Le salarié a obtenu gain de cause, les juges du fond ayant conclu à un manquement à l’obligation de sécurité de résultat.

La Cour de cassation confirme cette solution, sanctionnant finalement l’inertie dont a fait preuve l’employeur, en ces termes : « Mais attendu qu’après avoir relevé que la salariée souffrait depuis 2003 d’une grave maladie inflammatoire et qu’elle avait subi en septembre 2006 un accident vasculaire cérébral, la cour d’appel, qui a exactement retenu que l’avis du médecin du travail du 16 janvier 2009 préconisant une mutation dès que possible de l’intéressée dans un centre plus proche de son domicile obligeait l’employeur à effectuer des diligences, a constaté que celui-ci n’en justifiait pas concrètement ».

Il est à noter cependant que la Cour de cassation ne reprend pas dans son attendu la référence faite par la Cour d’appel à l’obligation de sécurité de résultat. Au contraire, elle signifie bien implicitement dans sa solution que l’obligation qui pèse sur les épaules de l’employeur reste une obligation de moyens, puisqu’elle ne prescrit à son attention qu’une exigence de diligence…Une telle solution s’inscrit donc dans la veine de l’arrêt Air France (Cass. Soc., 25 novembre 2015, n°14-24444).