L’employeur peut renoncer à ses poursuites disciplinaires sans commettre de faute (Cass. soc. 25 septembre 2013, n°12-11832)

Par cet arrêt publié au bulletin, la Cour de cassation affirme qu’un employeur qui a entamé une procédure disciplinaire peut décider d’y mettre un terme et renoncer à toute sanction sans commettre de faute, dès lors qu’il n’y a ni légèreté blâmable ni intention malveillante.

En l’espèce, le dirigeant d’une entreprise avait appris que le compagnon de sa gestionnaire et son frère avaient créé une entreprise, dont l’activité apparaissait directement concurrente à la sienne.
Il a alors convoqué la salariée à un entretien préalable en vue d’une éventuelle sanction disciplinaire, lui reprochant de ne pas l’avoir informé du fait que son concubin et son frère avaient créé une entreprise directement concurrente. L’entretien préalable s’est alors tenu. Pour autant, par la suite, l’employeur a finalement renoncé à prendre toute sanction à l’encontre de sa salariée et l’en a informé par courrier.

La salariée a néanmoins sollicité devant le Conseil de Prud’hommes la résiliation judiciaire de son contrat de travail au motif que son employeur avait commis une faute.

La Haute juridiction a considéré, contrairement à la Cour d’appel, qu’aucun comportement fautif de l’employeur ne pouvait être caractérisé en raison du seul engagement d’une procédure disciplinaire qui n’a pas été menée à son terme, dès lors que sa mise en œuvre ne procédait pas d’une légèreté blâmable ou d’une intention malveillante, en ces termes : « sans caractériser un manquement de l’employeur à ses obligations contractuelles qui ne saurait résulter du seul engagement d’une procédure disciplinaire qui n’a pas été menée à son terme, dès lors que sa mise en œuvre ne procède pas d’une légèreté blâmable ou d’une intention malveillante, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ».

Une telle solution apparaît logique dans la mesure où l’intérêt théorique de l’entretien préalable réside dans l’explication qui doit intervenir entre l’employeur (ou son représentant, par exemple le Responsable des Ressources Humaines) et le salarié. De cet échange peut naitre soit une sanction, soit un renoncement à la sanction de la part de l’employeur.

L’idée est donc que le sort du salarié ne soit pas scellé avant l’entretien ! Une telle approche, favorable au salarié, serait remise en cause si l’on venait à admettre que l’employeur commet une faute chaque fois qu’il convoque un salarié à un entretien « pouvant engendrer une sanction allant jusqu’au licenciement » et qu’il renonce finalement à sanctionner.

Cela reviendrait en effet à réduire sa faculté d’amender son point de vue, ce qui n’est pas conforme à l’esprit des textes et de nature à nuire aux intérêts de l’employeur mais aussi, et surtout, du salarié.

En l’espèce, nous ignorons finalement si le renoncement de l’employeur à la sanction s’explique par les explications convaincantes que lui auraient données la salariée ou par le fait qu’il ait été avisé par quelque conseil du fait que le contrat de travail ne contenait aucune clause permettant à l’employeur d’invoquer sa violation…(sauf à tenter de rebondir sur la fameuse obligation de bonne foi qui pèse sur tout salarié…)

MARILYN MAUDET-BENDAHAN. AVOCATE AU BARREAU DE NANTES.