Harcèlement moral : le harcèlement en cascade devant la Cour de cassation (Cass. soc. 29 janvier 2013, n°11-23.944)

Pour mémoire, en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, l’employeur est tenu d’une obligation de sécurité de résultat. En vertu de cette obligation, l’employeur doit assurer l’effectivité de cette protection.

Il ne saurait, notamment en matière de harcèlement, faire valoir la désobéissance de ses collaborateurs, afin de d’exonérer de sa responsabilité.

Seule échappatoire, l’employeur peut invoquer une délégation de pouvoir.

Il ne peut en revanche valablement se retrancher derrière une quelconque absence de faute de sa part.

Par un attendu de principe, la Chambre sociale de la Cour de cassation a affirmé qu’une entreprise ne pouvait pas licencier pour faute grave un salarié auteur de faits de harcèlement moral, dans la mesure où lui-même était victime de harcèlement et que la société ne l’avait pas sensibilisé à la difficulté de l’exercice de ses fonctions.

En revanche, selon la Cour de cassation, la cause réelle et sérieuse pouvait être retenue : « Mais attendu qu’ayant retenu que le salarié était lui-même victime de harcèlement moral et que l’employeur alerté à plusieurs reprises sur cette situation ne l’avait pas sensibilisé à la difficulté d’exercice de ses fonctions, la cour d’appel a pu décider que le licenciement ne reposait pas sur une faute grave et, exerçant les pouvoirs qu’elle tient de l’article L.1235-1 du code du travail, dire qu’il était fondé sur une cause réelle et sérieuse ».

Le comportement fautif du salarié harceleur est donc apprécié à l’aune des manquements de l’employeur à sa propre obligation de sécurité de résultat ! Le caractère fautif des faits commis par le harceleur est donc réduit en considération de sa propre situation de salarié harcelé.

Cette solution s’inscrit dans le droit fil d’un autre arrêt aux termes duquel la Cour de cassation avait déjà estimé que « quoique blâmable, le comportement du salarié ne revêtait pas, du fait de la pression exercée sur lui par l’employeur, un caractère sérieux justifiant son licenciement » (cass. soc. 8 novembre 2011, n°10-12.120).

Compris a contrario, il peut être déduit de l’arrêt du 29 janvier 2013, qu’un salarié qui se livrerait à des faits de harcèlement auprès de ses collègues pourrait faire l’objet d’un licenciement pour faute grave, pour peu qu’il ait été sensibilisé aux techniques et systèmes de management de l’entreprise.

MARILYN MAUDET-BENDAHAN. AVOCATE AU BARREAU DE NANTES.