Présomption d’imputabilité au travail d’un accident survenu lors d’une visite périodique auprès du médecin du travail (Cass. Civ. 2ème, 6 juillet 2017, n°16-20119)

Aux termes de l’article L. 411-1 du Code de la Sécurité sociale :

« Est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise ».

Selon la Cour de cassation, l’accident du travail répond à la définition suivante :

« constitue un accident du travail un évènement ou une série d’évènements survenus à date certaine par le fait ou à l’occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, quelle que soit la date d’apparition de celle-ci » (Cass. Soc., 2 avril 2003, n°00-21768).

Dès lors, la réunion des trois conditions suivantes permet de caractériser l’existence d’un accident de travail :

– un évènement ou une série d’évènements survenus à date certaine,
– une lésion corporelle,
– un fait lié au travail.

C’est sur la caractérisation de cette troisième condition que porte l’arrêt présent.

De jurisprudence constante, la Cour de cassation aborde avec une certaine souplesse cette condition tenant à un « fait lié au travail ».

La Cour de cassation affirme ainsi que toute lésion, survenue au temps et au lieu de travail, doit être considérée comme trouvant sa cause dans le travail sauf s’il est rapporté la preuve que cette lésion a une origine totalement étrangère au travail (Cass. Soc, 8 mars 1989, n°87-17755 ; Cass. Soc., 10 décembre 2009, n°08-20539).

Pour que cette présomption d’imputabilité puisse jouer, la victime doit au préalable établir que la lésion est survenue au temps et au lieu de travail.

En ce qui concerne le lieu de travail, sont en pris en considération de manière souple par la Cour de cassation les locaux où s’effectue le travail, tels que les bureaux, ateliers, chantiers mais également : les dépendances de l’entreprises, dès lors que l’employeur y exerce ses pouvoirs de surveillance et de contrôle (V. en ce sens s’agissant d’un local mis à la disposition des salariés pour leur repas : Cass. Soc., 5 janvier 1995, n°93-11500).

En ce qui concerne le temps de travail, la Cour de cassation le conçoit comme le temps durant lequel le salarié est placé sous l’autorité et la surveillance de l’employeur.

Entre dans ce périmètre, non seulement le temps de travail au sens strict mais également l’accident qui se produit avant ou après les horaires de travail, dès lors qu’il intervient à un moment où la présence du salarié est en rapport avec son activité professionnelle.

De même, peut être qualifié d’accident du travail celui qui survient en dehors des temps et lieux de travail, alors que le salarié se trouve sous l’autorité de l’employeur. La jurisprudence considère en effet que cette autorité peut trouver à s’exercer hors des murs de l’entreprise.

C’est précisément ce qu’illustre l’arrêt en présence rendu le 6 juillet 2017 par la Cour de cassation.

En l’occurrence, le salarié était décédé suite à un malaise survenu alors qu’il se trouvait dans les locaux des services de la médecine du travail. Il attendait alors dans la salle d’attente de pouvoir passer son examen médical périodique.

Ainsi qu’a pu le relever la Cour d’appel, l’accident est intervenu en dehors du lieu de travail et en dehors des horaires de travail, à savoir un jeudi, alors que le salarié ne travaillait pas le jeudi.

La Cour de cassation considère dans cette hypothèse que l’examen périodique devant le médecin du travail est inhérent à l’exécution du contrat de travail, si bien que le salarié demeurait sous l’autorité de l’employeur. Le salarié bénéficiait donc de la présomption d’imputabilité, comme s’il s’était trouvé au temps et au lieu de travail au moment de son décès.

La Haute juridiction pose cette solution au visa de l’article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale et en ces termes :

« Attendu qu’au sens de ce texte, le salarié est au temps et au lieu de son travail tant qu’il est soumis à l’autorité et à la surveillance de son employeur ;
[…]
Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que le salarié avait été victime d’un malaise quand il se trouvait dans les locaux des services de la médecine du travail en l’attente d’un examen périodique inhérent à l’exécution de son contrat de travail, de sorte qu’il devait bénéficier de la présomption d’imputabilité, la cour d’appel d’appel a violé le texte susvisé ».

Il reste à noter que la présomption d’imputabilité constitue une présomption simple et non irréfragable.

Charge alors à l’employeur, le cas échéant, de démontrer la preuve que la lésion du salarié a une origine totalement étrangère au travail.

Marilyn MAUDET-BENDAHAN. Avocat au Barreau de Nantes.