En l’espèce, un salarié avait saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation de son contrat de travail. Par la suite, il avait été licencié pour faute lourde par son employeur.
Or, au nombre des griefs présents dans la lettre de licenciement, l’employeur avait eu la maladresse de faire référence à l’action en résiliation judiciaire qui avait été engagée précédemment par le salarié, tout en invoquant d’autres motifs à l’appui de ce licenciement.
Les juges du fond ont débouté le salarié de sa demande en nullité du licenciement, en retenant que selon la lettre de licenciement, la décision de rupture du contrat de travail ne reposait pas sur le seul motif que le salarié avait pris l’initiative de saisir le conseil de prud’hommes.
La Cour de cassation ne l’a pas entendu ainsi.
Elle a ainsi estimé en ces termes : « Qu’en statuant ainsi, alors que ce grief, s’il figure en tant que tel dans la lettre de licenciement, est constitutif d’une atteinte à une liberté fondamentale et entraîne à lui seul la nullité du licenciement, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».
Autrement dit, le fait pour l’employeur d’avoir – dans la lettre de licenciement – reproché au salarié d’avoir saisi la juridiction prud’homale d’une action en résiliation judiciaire constitue une atteinte à une liberté fondamentale, à savoir la liberté d’agir en justice fondée sur l’article 6§1 de la Convention EDH.
Mécaniquement, une telle atteinte justifie alors l’annulation du licenciement prononcé par l’employeur.
L’autre apport intéressant de la solution réside dans l’effet viral donné au motif illicite de licenciement. En effet, la Cour de cassation précise bien que ce grief « entraîne à lui seul la nullité du licenciement ».
Cela signifie donc que le motif illicite figurant dans la lettre de licenciement a finalement eu pour effet d’absorber les autres griefs, quand bien même ceux- ci seraient-ils fondés.
Peu importe au total qu’ils soient fondés ou non, ils ne seront même pas étudiés par la juridiction en présence, qui ne disposera plus de cette marge d’appréciation dès lors qu’elle constatera une atteinte à une liberté fondamentale (V. déjà en ce sens : Cass. Soc., 10 juin 2015, n°13-25554 ; Cass. Soc., 3 février 2016, n°14-18600).
Marilyn MAUDET-BENDAHAN. Avocate au barreau de Nantes.