Face à des solutions divergentes rendues par les cours d’appel, la Cour de cassation a finalement tranché, en affirmant que l’existence d’un litige entre les parties ne fait pas obstacle à la conclusion d’une rupture conventionnelle.
En l’espèce, il s’agissait d’une avocate salariée dont l’employeur, le célèbre cabinet ORATIO, reprochait plusieurs manquements professionnels. Ne souhaitant cependant pas la licencier pour « préserver des relations confraternelles », la salariée a accepté la rupture conventionnelle qui lui a été proposée.
La procédure contentieuse est ici spécifique. Ainsi, dans la mesure où un avocat salarié entend faire valoir ses droits, il lui appartient de saisir le bâtonnier compétent.
C’est ce qu’a fait cette avocate, afin que ladite rupture conventionnelle soit requalifiée en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La Cour d’appel a fait droit à sa demande, estimant d’une part que son consentement avait été vicié et, d’autre part, qu’il existait un litige entre l’employeur et la salariée quant à l’exécution du contrat de travail.
La Cour de cassation a également fait droit à la demande de la salariée mais, si elle parvient à la même solution que la Cour d’appel, c’est en adoptant un autre raisonnement juridique.
La Cour de cassation s’appuie en effet sur la théorie des vices du consentement, en visant la violence morale.
Elle estime ainsi que le consentement de la salarié été vicié du fait que l’employeur l’avait menacée de ternir sa réputation en raison de ses erreurs et manquements et l’avait poussée, par une forte pression, vers la voie de la rupture conventionnelle.
L’autre apport de cet arrêt réside dans le fait que la Cour de cassation a écarté le motif de l’existence d’un litige entre les parties pour faire droit à la demande de la salariée.
En effet, pour la Cour de cassation « l’existence, au moment de sa conclusion d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de convention de rupture conventionnelle ».
La Cour de cassation ouvre donc la voie aux ruptures conventionnelles effectuées dans un contexte conflictuel à condition que le consentement du salarié soit libre, clair et éclairé.
Ce faisant, elle met un terme à l’insécurité juridique qui régnait en la matière jusqu’ici.
MARILYN MAUDET-BENDAHAN. AVOCATE AU BARREAU DE NANTES.