Pour mémoire, la prise d’acte s’analyse comme un mode de rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié en raison des manquements graves qu’il reproche à son employeur mais dont l’appréciation finale reste entre les mains des conseillers prud’homaux.
Ainsi, la prise d’acte emporte les effets soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les manquements reprochés à l’employeur sont justifiés, soit d’une démission dans le cas contraire.
Concrètement, le salarié :
- informe l’employeur de sa prise d’acte par courrier,
- ne vient plus travailler,
- saisit le Conseil de Prud’hommes pour obtenir réparation de son préjudice.
Dans la mesure où le salarié est à l’initiative de la prise d’acte, la jurisprudence se montre compréhensive et ne soumet la prise d’acte à aucun formalisme particulier.
Elle peut même valablement être présentée par l’avocat d’un salarié, au nom de celui-ci (Cass. soc., 4 avril 2007, n° 05-42847 ).
La Cour de cassation a par exemple estimé que le saisine du Conseil de prud’hommes par un salarié pour voir juger que la rupture intervenue est imputable à l’attitude fautive de l’employeur ne peut être assimilée à une prise d’acte, mais doit être analysée comme une demande de résiliation judiciaire (Cass. soc., 19 novembre 2014, n°13-22054 ).
En l’espèce, la salariée avait saisi la juridiction prud’homale en référé, arguant de l’inaction de l’employeur dans l’organisation de la visite de reprise suite à un accident du travail. Au cours de cette audience de référé, la salariée avait ensuite sollicité la prise d’acte. La demande en référé ayant été rejetée, le contrat s’était poursuivi normalement. Quelques mois plus tard, l’employeur avait finalement licencié la salariée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
La salariée considérait que son licenciement était non avenu puisque son contrat avait déjà été rompu par la prise d’acte formulée en audience devant la formation de référé. Ce faisant, la salariée entendait donc faire finalement application de l’adage « rupture sur rupture ne vaut ».
L’arrêt en présence s’inscrit dans cette même logique en énonçant que le fait pour le salarié de déclarer, au cours de l’audience prud’homale, vouloir prendre acte de la rupture de son contrat de travail, ne constitue pas une prise d’acte.
La seule exigence est que la prise d’acte soit toutefois directement adressée à l’employeur.
Ainsi, plusieurs formulations peuvent être considérées comme une expression de la prise d’acte. Par exemple : « Je prends acte de la rupture de votre fait » ou encore « Je me considère comme licencié ».
Par hypothèse, la prise d’acte intervient donc en présence d’une situation conflictuelle. Le salarié reproche ainsi à son employeur un manquement à ses obligations, mais n’entend pas endosser la responsabilité de la rupture.
La Cour de cassation a écarté cet argument, conformément à sa ligne, en considérant que la prise d’acte n’avait pas été adressée directement à l’employeur, ce qui la privait de tout effet. Le licenciement de l’employeur pouvait donc valablement intervenir puisque le contrat de travail était alors toujours en cours.