Conformément au principe de réparation intégrale qui irrigue notre droit, l’existence d’une pluralité de préjudices distincts appelle une réparation de l’ensemble de ces préjudices.
La Cour de cassation a fait application de ce principe à diverses occasions en matière de droit du travail.
Ainsi, elle a pu estimer que le salarié, victime à la fois d’une discrimination et d’un harcèlement, pouvait prétendre à une double indemnisation…pour peu qu’il puisse justifier de l’existence de préjudices distincts (Cass. Soc., 3 mars 2015, n°13-23521).
Par la suite, la Cour de cassation a reconnu l’existence d’une indemnisation spécifique relative au manquement de l’employeur à son obligation de prévention en matière de harcèlement moral. Cette indemnisation spécifique venant alors s’ajouter à la plus classique indemnisation au titre du harcèlement moral éventuellement subi (Cass. Soc., 6 juin 2012, n°10-27.694).
Dans l’arrêt en présence, la Cour de cassation procède par analogie et transpose sa jurisprudence rendue en matière de harcèlement moral au cas du harcèlement sexuel.
Le salarié peut donc cumuler la réparation :
- du préjudice physique et moral résultant du harcèlement sexuel,
- du préjudice résultant du manquement de l’employeur à son obligation de prévention de tels agissements.
Cette double réparation repose sur la violation de manquements distincts, reposant sur des textes distincts :
- la réparation de la violation de l’obligation de prévention repose sur les dispositions de l’article L. 1153-5 du Code du travail, selon lesquelles : « L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel »,
- la réparation du préjudice résultant du harcèlement sexuel lui-même qui repose sur les dispositions de l’article L. 1153-1, selon lesquelles « Aucun salarié ne doit subir des faits […] de harcèlement sexuel (…) ».
Dès lors, un salarié victime de deux préjudices distincts peut prétendre à une double indemnisation, y compris en matière de harcèlement sexuel.
Il revient donc au conseil du salarié, à l’instar de l’avocat en matière de réparation du préjudice corporel, de décortiquer le préjudice subi afin d’obtenir la pleine et entière indemnisation du préjudice subi, conformément au principe français de réparation intégrale.
Marilyn MAUDET-BENDAHAN. Avocate au Barreau de NANTES.