En l’espèce, un salarié sollicitait des dommages et intérêts en raison du harcèlement moral subi de la part de son employeur. Ce salarié s’appuyait notamment sur le comportement du médecin du travail, qui avait refusé de délivrer un avis d’aptitude ou d’inaptitude et de procéder à une étude de poste.
La cour de cassation, approuvant la Cour d’appel, refuse de suivre le raisonnement du salarié, en ces termes : « Attendu, ensuite, que le médecin du travail, même salarié au sein de l’entreprise, assure les missions qui lui sont dévolues aux termes de l’article L. 4623-8 du code du travail dans les conditions d’indépendance professionnelle définies et garanties par la loi ; que c’est dès lors à bon droit que la cour d’appel a décidé que le comportement du médecin du travail dans l’exercice de ses fonctions n’était pas susceptible de constituer un harcèlement moral de la part de l’employeur ».
Une telle solution n’allait pas nécessairement de soi puisqu’il est de jurisprudence constante que le harcèlement moral est susceptible d’être commis par toute personne liée à l’entreprise : l’employeur lui-même mais aussi un supérieur hiérarchique, un collègue et même par un subordonné du salarié plaignant (Cass. crim. 6 décembre 2011 n° 10-82.266).
L’employeur est ainsi tenu à une obligation de sécurité en matière de santé au travail et est en quelque sorte responsable du comportement de l’ensemble de ses salariés.
En l’espèce, la circonstance que le médecin du travail était un salarié de l’entreprise est comme « neutralisée » par le fait que, selon la Cour de cassation, tout médecin du travail assure les missions qui sont dévolues dans « des conditions d’indépendance professionnelle ».
Il serait donc parfaitement possible pour le médecin du travail d’accomplir ses missions en toute indépendance et malgré le lien de subordination qui l’unit à son employeur.
Ces arguments ne sont pas sans rappeler par ailleurs le débat qui a occupé la communauté des juristes en 2015, s’agissant des avocats en entreprise dont l’indépendance vis-à-vis de leur employeur pouvait être légitimement mise en doute…Pour autant, sur ce dernier sujet, il faut préciser que, finalement, la commission spéciale de l’Assemblée nationale a retiré les dispositions du projet relatives à la création de l’avocat en entreprise.
Marilyn MAUDET-BENDAHAN. Avocate au Barreau de Nantes.